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Coup de cœurL'attelage de Traditionmust

Interview d’un cheval de volée ©

By 15 août 20252 Comments

– Je ne vous cache pas que je préfère le tandem parce que je suis un peu cabotin. Je suis le « leader »… celui que l’on admire. Je caracole devant, et surtout, voyez-vous, je ne tire pas la voiture.

            Avantageux, n’est-ce pas ?

            Je fais d’ailleurs preuve de mon excellent caractère en restant sagement devant mon compagnon qui, lui, tire vraiment la voiture, alors que moi je me promène, pratiquement en liberté… hi, hi, hi !

            Si je voulais, je pourrais mettre mon meneur dans l’embarras et venir d’un prompt demi-tour voir ce qu’il en pense et la tête qu’il fait sous son huit reflets… élaborer des nœuds autour des arbres et l’écouter perdre son sang-froid, me mettre en paire au côté du « wheeler » et tailler une bavette avec lui, ou même encore… tenter de le dévergonder.

           

 

John Sturgess (1869- 1903)

           Comme j’ai l’esprit malicieux, j’imagine toutes sortes de fantaisies : tirer, jusqu’à ce que j’aie le nez sur le marchepied de la voiture qui me précède : la meneuse m’a semblé fort jolie, et croquer les cerises de son chapeau.

            Faire un écart et coincer mon dog-cart de collection dans un buisson, ou m’arrêter à l’abreuvoir, mais, non : le « wheeler » risquerait de me marcher sur les talons, ce qui pourrait me donner l’envie de croupionner, mais je suis bien élevé, je ne tape pas… lâcher la main et m’en aller au vent qui passe, semant la mort sur mon passage.

            Non, pas ça.

            J’ai ma fierté et suis bien trop gentil pour tomber aussi bas.

            Refuser d’avancer et attaquer cette herbe fraîchement coupée dont les effluves me chatouillent les naseaux… ou bien encore m’asseoir, mais oui, le public adore ça… puis commencer à me rouler !

            Mais bon, je me contente de gamberger.

            Là-haut, derrière moi, le fouet est agile, et la dernière fois que je me suis fait remarquer, je me suis retrouvé dans les brancards, alors que franchement, ce n’est pas mon emploi.

            On ne m’y reverra pas !

Julie Wasselin-Degrange

§§§§

Extrait de son livre « Sous le regard des chevaux » préfacé par le général Durand.  Éditions de l’Haramattan.

https://www.editions-harmattan.fr/index.asp?navig=auteurs&obj=artiste&no=23744

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